Mike Velo_Xperience Kouchibouguac

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“ Nous ne sommes peut-être pas responsables du monde que nous créons dans notre esprit, mais nous pouvons être responsables del’esprit avec lequel nous créons notre monde. ”
― Gabor Maté

La chaise profonderembourrée en cuir est très confortable. C’est juste que je ne suis pas à l’aise de m’y assoir. En regardant par la fenêtre près de moi, je remarque l’éclat de la forêt dehors, un monde dont je ne me sens plus faire partie. Je suis pris dans cette autre dimension brumeuse. Cet épais brouillard qui ne s’élève jamais. Incapable de me sauver en courant. Dans mon purgatoire personnel. Immobile.
Ma psychologue rompt le silence de mon regard vacant quand elle tend la main pour m’offrir un stylo et du papier. Je suis venu la voir dans un essai désespéré d’obtenir de l’aide avec le fait que mon cerveau brisé ne me permet plus de monter sur mon vélo. Et sans cela, en toute honnêteté, je ne sais vraiment plus comment continuer à exister. Elle me demande de dresser la liste des traumas de ma vie jusqu’à présent. Mon top 5. Ou plus. Tout ce qui ressort, dit-elle. Je ne comprends pas vraiment. Qu’est-ce qu’une telle liste a à voir avec ma commotion cérébrale ? Mais je n’ai pas l’énergie de raisonner ou d’argumenter avec elle. Tout ce que ma cervelle meurtrie et battue peut faire est de suivre ses instructions. Je commence à écrire. Alors que je pose doucement mon crayon, mon focus déformé s’arrête sur les particules de poussières qui dansent dans le rayon de soleil brillant de ce début d’hiver qui éclaire le mur derrière elle. Le reste de l’univers continue son chemin comme d’habitude. Le soleil brille comme il le fait toujours. Pourquoi ne peut-il plus éclairer mes jours comme auparavant ?Même ces grains de poussière qui virevoltent semblent de meilleure humeur que moi en ce moment.

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Combien en avez-vous écrit ? Ses mots me surprennentcomme si j’étais perdu dans une transe profonde. J’en ai cinq. Après que je lui remets ma liste, je l’épie pour sa réaction alors qu’elle la lit, alors que j’essaye toujours de comprendre comment ceci est supposé m’aider à accepter la réalité que je m’enfonce de plus en plus profondément dans ce trou noir pendant que mes vélos se couvrent de poussières. Elle répète le second sur ma liste. Abus sexuel. L’entendre le prononcer à haute voix me fait tressaillir. Cette chaise profonde rembourrée en cuir est soudainement devenue encore moins confortable. Comment quelque chose qui est survenu il y a près de 35 ans peut-il encore avoir tant de pouvoir sur moi ? Littéralement, seule une poignée de personnes savent que je suis un survivant d’abus sexuel. Mes parents. Ma femme. Et quelques psychologues. Ce squelette dans ma garde-robe. Mon secret le plus profond. Toujours présent. La vérité cachée. Ce mensonge que je me répète sans cesse.
Pour aussi longtemps que je peux m’en souvenir, les vélos symbolisent la liberté pour moi. La liberté d’errer. La liberté d’explorer. La liberté de sentir qu’à la fin, tout ira bien. Une liberté sincère. Cette liberté qui donne la vie m’a été arrachée par cette blessure à la tête. Peut-être que son but est d’éclairerce secret que je détiens depuis si longtemps ? Si le dicton « la vérité vous libèrera » est vrai en effet, alors peut-être travailler sur la guérison de mon trauma sexuel est la première étape pour réclamer cette liberté perdue ? Une vraie liberté n’est pas des demi-vérités. C’est tout ou rien. Peut-être que mon cerveau brisé pourra seulement guérir en replaçant ensemble mon moi fragmenté ? Peut-être que la seule façon d’aller de l’avant est de mettre fin à ce mensonge et de me débarrasser de tous ces sentiments de culpabilité et de honte enfouis au fond de moi ? Peut-être qu’il est temps d’incarner ma vérité et d’arrêter de vivre cette demi-vie ? Tout a changé avec cette nouvelle chimie cérébrale embrumée dans laquelle je flotte. Je pense que tout ce que je peux faire est de laisser aller et de le laisser me changer. Je suis l’exemple de ma psychologiste. Allons-y. Même si je sens que j’ai atteint le bas fond, étrangement je me sens enfin prêt à y aller. Je mise tout.

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Pour les deux prochaines années, toutes les trois ou quatre semaines, je me suis assis dans cette chaise profonde rembourrée en cuir. Revisité le passé. Versé ces larmes usées par le temps. Donné des coups de pied. Crié. Rappelé. Ressenti. La chaise ne change pas, mais elle devient peu à peu plus confortable. Ceci ne survient pas seulement avec la chaise. Je commence aussi à dévorer des livres qui inspirent mon essence vraie. Je médite. Je pratique le yoga. Je commence à écrire un journal. Et lentement, si lentement, je monte à nouveau sur mes vélos. Je ne suis pas certain comment, mais verbaliser les détails de mon abus sexuel dans un endroit sécuritaire me permet de laisser aller les émotions qui y sont rattachées. La psychothérapie laisse en quelque sorte remonter à la surface les parties cachées et niées de moi issues de ce trauma. Le gros de chaque rendez-vous n’est plus au sujet de ma commotion cérébrale, même si les symptômes continuent à se faire sentir. C’est plutôt revisiter ces événements traumatiques, me permettre de sentir ce que je n’étais pas équipé pour le faire quand ils sont survenus et faire le deuil de ce qui a été perdu. Plus que je m’ouvre, plus d’élan guérisseur est créé. Débloqué de mon passé, je me libère de ces chaines, tellement d’énergies positives coulent maintenant sans résistance. La guérison physique de mon cerveau blessé alimentée par tout ce travail émotionnel que j’effectue. Être en santé n’est pas seulement faire suffisamment d’exercice et manger les bons aliments. C’est aussi à propos de l’équilibre de notre corps avec notre psyché et nos émotions. Cet état d’équilibre est la clé.
Avançons rapidement de cinq années jusqu’en 2021, mon cerveau physique est presque guéri. Je peux chevaucher confortablement mon vélo sans symptômes post-commotion cérébrale. Mais je ne suis plus la même personne que j’étais avant mon accident. Je suis plus content. Je suis plus en paix. Je suis plus vrai. Et je suis très à l’aise quand je suis seul. Tellement à l’aise que j’en ai envie. Seul à vélo. Seul dans la nature. J’apprécie vraiment ma compagnie. Un de mes besoins fondamentaux. Alors que septembre expire en octobre, j’embarque mon vélo et mon équipement dans mon camion pour me diriger vers le nord. Cette cabine d’Xpérience Kouchibouguac m’offre toutes les commodités dont j’ai besoin pour accueillir ma retraite de méditation personnelle à vélo sur le gravier. Les sentiers du parc national mènent directement au stationnement du complexe de cabines. Trois jours. Trois nuits. Et trois randonnées à vélo extraordinaires, en plus de quelques excursions à pied. Quelque chose à propos du dynamisme et de l’immobilité de la forêt a réanimé le souffle de vie en moi. Cet air frais et humide. Purifiant. Ces arbres de la forêt. Envoutants. Aucune intention cachée. Simplement vivre pleinement pour le moment. Alors que je pédale dans cette forêt protégée, je réfléchis au chemin parcouru depuis que je me suis assis dans cette chaise profonde en cuir rembourré. Comment me suis-je rendu ici ? La vérité est que je n’étais jamais le seul occupant de ce siège. Le jeune adolescent naïf aux cheveux huileux en moi y était aussi, assis juste à côté de moi. Mon enfant intérieur. Il avait besoin d’être là. Il avait besoin d’être enfin entendu. Il avait besoin qu’on le tienne étroitement et lui donne un câlin. Il avait besoin de guérir pour me permettre de devenir entier.

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Toutes les expériences de ma vie vivent à l’intérieur de moi. Toutes les anciennes versions de moi forment qui je suis. Et elles m’accompagnent partout où je vais. Au travail. À la maison. Et sur chacune de mes sorties à vélo. Se lier d’amitié, appuyer et nourrir chacune d’entre elles représentent comment je continue à guérir et àvivre une vie épanouie. À l’aise avec moi-même. Paisiblement seul, mais jamais esseulé. Rassuré et réconforté par toutes ces anciennes versions de moi. C’est pourquoi ce travail est si important. Le travail de ma vie. Mon désir d’atteindre ma date d’expiration à vide. Rien à cacher. Rien d’autre à dire. Rien d’autre à faire. Rien à relâcher. Nous sommes les seuls qui peuvent nous sauver. Ça m’a pris du temps à comprendre ceci, mais dès que je l’ai fait, tout a changé.

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